The Fog of War (The Fog of War:
Eleven Lessons from the Life of Robert S. McNamara)
Un film
d’Errol Morris
Avec Robert
S. McNamara
The Fog of War est un documentaire, qui fût réalisé avant l’invasion américaine en Irak, point important à souligner lorsque l’on découvre (seulement) aujourd’hui ce documentaire magnifique.
Un film récompensé par l’Oscar du meilleur documentaire en 2004, amplement mérité au vu de sa remarquable réalisation, de son montage brillant mais surtout de son contenu, que l’on peut qualifier d’essentiel, voire d’historique.
Ce documentaire se présente sous la forme d’un entretien avec Robert Strange McNamara, brillant employé de Ford après la seconde guerre mondiale, où il fit partie notamment de l’équipe qui prépara les attaques à la bombe incendiaire des villes japonaises (67 villes en tout furent victimes de ces bombes), préalable malheureux aux attaques nucléaires, puis devenu secrétaire de la défense sous Kennedy en 1961 puis sous Johnson. Celui qui se retrouvera principalement au cœur de la tourmente vietnamienne, véritable bourbier dans lequel les américains s’enfoncèrent jour après jour, avec les victimes que nous connaissons.
Devenu ensuite président de la banque mondiale pendant 13 années, il a depuis participé à divers projets tournés vers la paix, le développement économique et la santé. Il rencontra même Castro et son opposant vietnamien pour établir le dialogue.
Véritable homme du XXème siècle, brillant politicien et économiste, The Fog of War lui donne l’opportunité, en 11 leçons de revenir sur les causes des guerres, les erreurs des hommes, les crises et ce qui permit de les surmonter ou d’y sombrer. Une leçon de politique majestueuse par l’un de ses personnages les plus importants, malgré son bref passage (7 années) au pouvoir.
Homme controversé, McNamara n’en est pas moins humain. De ce long entretien qui revient sur sa vie et les événements qui l’ont jalonné, il en ressort l’évidente conclusion que le dévouement de cet homme à son travail dépassait tout, même parfois la raison, le bon sens et l’humanité si l’on évoque la guerre du Vietnam.
Il décrypte, anecdote les relations américano-russes, la guerre froide qui fit rage et ses enjeux énormes (une possible guerre nucléaire), la crise des missiles, la guerre du Vietnam, les relations de pouvoir au sein du gouvernement américain, ses relations avec Kennedy, puis Johnson. Une leçon de politique impressionnante.
Errol Morris utilise un montage extrêmement brillant, constitué de beaucoup d’images et vidéos d’archives mais aussi d’enregistrements sonores, de conversations entre McNamara et Johnson par exemple sur des sujets hautement sensibles comme la manière de diffuser les informations, de préparer les discours ou encore de la marche à suivre pendant la guerre du Vietnam, des entretiens historiques. L’entretien se fait face caméra, ce qui permet de saisir le regard de McNamara, parfois rieur, parfois triste, parfois fermé (notamment sur son rôle dans la guerre du Vietnam).
Les leçons de McNamara s’égrènent et fascinent par leur richesse et la passion qui habite l’homme. Un homme de politique, mais pas seulement, il y a chez McNamara cette prestance des « grands » du monde contemporain.
Nul doute que The Fog of War restera l’un des meilleurs documentaires jamais réalisé sur la politique américaine. Moins virulent et spectaculaire que Farenheit 9/11, The Fog of war est plus didactique mais réellement passionnant et s’érige comme le fil tenu de leçons à apprendre des erreurs du passé. Comme le dit si bien l’accroche qui figurait en haut de l’affiche, une citation du journaliste Stephen Holden (New York Times), « S’il y a un seul film que doivent voir les leaders militaires et civils en ces temps dangereux et historiques (…), c’est The Fog of War. Dommage que certains leaders des grandes sociétés occidentales n’aient pas retenu cette leçon pleine de bon sens.
Plus qu’un simple documentaire, The Fog of War est une remarquable leçon d’histoire donnée par l’un de ceux qui l’a écrite au cours du XXème siècle.
A voir absolument.
Arnaud Meunier
16/10/2005